Promulguée le 9 décembre 2016, la loi Sapin 2 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique innove en matière de lutte contre la corruption. Après s’être centrée pendant plus de 20 ans sur la sphère publique, le combat anticorruption est élargi aux entreprises, devenus fers de lance du combat.
Les entreprises ont l’obligation de déployer en interne des mesures de prévention et de détection des faits de corruption et de trafic d’influence. Mais toutes les entreprises sont-elles concernées ? Nous faisons le point sur le champ d’application de la loi Sapin 2.
Un champ d’application strictement encadré par la loi
Quelles sont les sociétés concernées par les obligations de la loi Sapin 2 ?
L’article 17 de la loi Sapin 2 précise clairement les sociétés concernées par les obligations anticorruption de la loi Sapin 2.
Plus précisément, le texte de loi vise « les présidents, directeurs généraux et gérants des sociétés employant au moins cinq cents salariés, ou appartenant à un groupe de sociétés dont la société mère a son siège social en France et dont l’effectif comprend au moins cinq cents salariés, et dont le chiffre d’affaires ou le chiffre d’affaires consolidé est supérieur à 100 millions d’euros ».
Toutes les sociétés répondant à cette définition sont concernées, quelle que soit leur forme juridique (SA, SARL/EURL, SAS, SNC, Société en commandite simple ou par action, SCI, etc.)
Les obligations s’imposent aux filiales françaises ou étrangères rattachées à une maison mère dont le siège social est localisé en France, et respectant le même double critère : 500 salariés minimum et 100 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Sont également concernées les administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics et sociétés d’économie mixte, et des associations et fondations reconnues d’utilité publique. Les obligations anticorruption de la loi Sapin 2 s’imposent aussi dans le domaine public « aux présidents et directeurs généraux d‘établissements publics à caractère industriel et commercial employant au moins cinq cents salariés, ou appartenant à un groupe public dont l’effectif comprend au moins cinq cents salariés, et dont le chiffre d’affaires ou le chiffre d’affaires consolidé est supérieur à 100 millions d’euros. »
Qu’en est-il des TPE et PME ?
Théoriquement, les TPE et PME ne sont pas concernées par les obligations de la loi Sapin 2 . Les effectifs et chiffres d’affaires des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises sont au-dessous des seuils fixés par l’article 17.
Néanmoins, toutes les TPE et PME en relation commerciale avec une société concernée par les mesures anticorruption sont indirectement impactées. Si elles sont clientes ou fournisseurs de premier rang de l’entreprise, elles sont concernées par l’évaluation de l’intégrité des tiers. Elles doivent donc être en mesure de « montrer patte blanche » et de justifier de leur exemplarité en matière de corruption, pour espérer conclure des engagements et contrats.
Une TPE et une PME peuvent aussi exercer dans un secteur d’activité particulièrement exposé à la corruption. Dans ce cas, même s’il n’y a pas d’obligation légale, elles auront tout intérêt à déployer volontairement des mesures de lutte contre la corruption, avec à la clé des retombées à ne pas négliger :
- Apparaître comme des partenaires commerciaux sûrs auprès des grandes sociétés avec lesquelles elles ont des relations commerciales
- Donner une image fiable auprès des banques et des investisseurs
- Se constituer des preuves solides en cas d’accusations ou de faits avérés de corruption et d’enquête judiciaire menée par des autorités françaises ou étrangères
- Prévenir les risques de corruption au sein même de leur propre entreprise
Pour déployer une politique anticorruption, les TPE et PME peuvent s’inspirer des recommandations publiées sur le site internet de l’Agence Française Anticorruption (AFA).
Elles peuvent être adaptées par toute organisation publique ou privée, quels que soient la taille, la forme sociale, le secteur d’activité, le chiffre d’affaires ou l’effectif.
Un champ d’application territorial élargi
La loi Sapin 2 étend le champ d’application extraterritorial du droit pénal français aux infractions de corruption et de trafic d’influence impliquant des personnes physiques ou morales de nationalité étrangère.
Cela signifie que le droit pénal français s’applique lorsque des faits sont commis à l’étranger par des Français ou des personnes ayant leur résidence en France, mais aussi par des personnes de nationalité étrangère « exerçant tout ou partie de son activité économique sur le territoire français » comme stipulé dans l’article 435-11-2 du Code pénal.
La loi Sapin 2 est la loi de référence de la lutte anticorruption en France. Longtemps centrée sur la sphère publique et nationale, elle renforce la lutte contre la corruption, l’étendant à la fois à des acteurs privés – les entreprises -, et à la scène internationale. La France répond ainsi aux critiques européennes, avec l’ambition de « retrouver sa crédibilité » et « devenir une République exemplaire », selon les mots de Michel Sapin, ancien ministre français de l’Économie et des Finances. Avec la loi Sapin 2, la France a relevé une partie de son pari, même si l’OCDE souligne encore des manques dans son rapport de 2021 relatif à la politique française de lutte contre la corruption.
Qu’est-ce que la loi Sapin 2 ?
La loi Sapin 2 est une loi publiée en 2016 relative à la lutte contre la corruption, la transparence de la vie publique et la modernisation de la vie économique. Elle est constituée de 169 articles légiférant sur de nombreux thèmes comme le déploiement d’un dispositif anticorruption dans les entreprises, l’encadrement du lobbying, la protection des lanceurs d’alerte, l’encadrement des rémunérations des dirigeants d’entreprise ou encore le renforcement de la régulation financière des marchés. L’ambition de ce texte est de « proclamer une République exemplaire » selon les mots de son instigateur Michel Sapin.
Quelles sont les obligations de la loi Sapin 2 pour les entreprises ?
En application de l’article 17, les entreprises doivent déployer un programme de mise en conformité interne qui se décline en huit mesures, encore appelées piliers. Elles doivent mettre en place :
- Un code de conduite interne, intégré au règlement intérieur de l’entreprise, définissant les types de comportements à proscrire
- Des formations de prévention pour les collaborateurs exposés au risque
- Une évaluation de l’intégrité des tiers, avant l’entrée en relation et tout au long de cette même relation
- Un dispositif d’alerte permettant de recenser les signalements et attitudes suspectes au regard de l’anti-corruption
- Des contrôles comptables et un dispositif de contrôle interne pour repérer d’éventuels faits de corruption ou de trafic d’influence
- Un régime disciplinaire détaillant les sanctions en cas de comportements contraires au code de conduite
- Une évaluation continue du dispositif pour mesurer son efficacité et l’adapter si nécessaire
Le contrôle du respect de ces obligations est confié à l’Agence Française Anticorruption (AFA). Si l’agence constate des manquements dans leur application, elle dispose de trois niveaux de sanction, allant de l’avertissement à l’amende, en passant par l’injonction.
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